Retour de lecture pour : Waterwitch de Alex Bell
Certains de mes retours de lecture peuvent présenter des éléments d’intrigues.
Retour de lecture :
Avant de vous parler de ce livre, il faut que je vous avoue que j’ai d’abord été séduite par la sublime couverture, cette magnifique illustration est de Len Yan, j’avais juste envie de mentionner son nom parce que vraiment j’ai craqué sur son oeuvre. Le titre bien sûr m’a donné encore plus envie de lire ce roman de la collection pour adolescents Cheshire, la 4e de couverture a fini de me convaincre de me le prendre. Et c’est ici que je vous annonce d’emblée que si vous aimez les terreurs, les sorcières et l’univers marin, ça serait vraiment, vraiment dommage de ne laisser ce roman qu’aux ados….
J’ai envie de commencer par vous parler de ce roman en mettant en avant qu’un des trois protagonistes principaux est une jeune fille handicapée. Combien de héros de roman sont en chaise roulante et mettent en avant la difficulté quotidienne d’évoluer dans un monde de valides ? Peu n’est-ce-pas ? Et bien c’est vraiment l’un des éléments que j’ai adoré, élément complété par la présence d’un chien d’assistance qui a toute sa place dans l’intrigue et une vraie personnalité. C’est, à mon sens, un des gros atouts de ce roman.
Revenons à l’univers du livre. Dans une petite ville portuaire anglaise, on accompagne Emma qui retourne sur les lieux de son accident pour aller voir sa grand-mère malade. Cette dernière est propriétaire d’un hôtel, le Waterwitch, construit avec le bois d’un navire dit maudit. Dès le début, on comprend que le nœud de l’intrigue c’est cette auberge mais ce qui est brillant c’est que l’autrice prend le parti de proposer principalement des personnages sceptiques qui cherchent absolument une explication logique aux phénomènes. Inconsciemment, plus les héros cherchent la logique, plus le lecteur comprend que l’explication n’est pas là. Avec une écriture métaphorique très sensorielle, l’autrice dresse un univers froid, moite, brumeux, inquiétant, angoissant et qui ne fait qu’aller crescendo jusqu’à la fin. Les descriptions très visuelles nous plongent irrémédiablement dans une univers marin étouffant, sombre, celui de tous les cauchemars où finalement les fantômes des marins semblent presque sympathiques.
La rampe était sculptée de bernacles, d’algues et de coquillages, comme si elle essayait de vous convaincre que vous vous étiriez au fond de la mer. Que vous aviez coulé avec le navire. Que vous étiez pris dans une vie après la mort hideuse dont vous ne pouviez vous échapper.
La plume de l’autrice est fine et joue énormément sur les peurs enfantines qui peuvent devenir de vraies phobies d’adultes, le champ lexical de la mer et de la navigation est donc bien sûr extrêmement présent mais, on s’y attendrait moins, celui des créatures rampantes et des insectes est utilisé en fil rouge également, ce qui, in fine, fait un combo très efficace. On sent que l’autrice a vraiment travailler ses métaphores filées et ses descriptions pour planter le cadre et installer une ambiance délétère et cauchemardesque qui joue sur les peurs viscérales.
Une autre qualité de ce roman réside dans les fausses pistes qui sont disséminées de droite et de gauche, cela peut paraître anodin dit comme ça mais c’est un des éléments qui rend une narration addictive et prenante, le lecteur veut savoir, il se projette pour essayer de comprendre et d’anticiper ce qui va arriver, notamment dans le cadre d’un terreur ou inconsciemment pour avoir moins peur et être moins surpris on a tendance à vouloir prévoir le prochain sursaut.
Les protagonistes principaux sont intéressants parce qu’ils amènent des problématiques périphériques telles que la maltraitance infantile, le handicape, la folie et la différence. Autant de thématiques prenantes qui font inévitablement entrer en empathie avec les héros du roman, résilients sans être des « super-héros », ils avancent inexorablement dans la vie comme ils peuvent, avec peu de moyens et seulement leur volonté pour essayer de s’en sortir et de surpasser les épreuves de leur vie, ils sont vulnérables et terriblement attachants.
Comme dans tout bon roman/film d’horreur ou de terreur, la maison est personnalisée, en dehors des êtres qui la hantent, elle bouge, change, évolue, respire et bouge ce qui ne fait bien sûr qu’accentuer l’effet d’étouffement et de danger imminent.
Voilà de nombreux éléments qui, pris séparément, paraissent logiques dans la construction d’un roman mais ce n’est pas si souvent le cas qu’ils sont utilisés ensemble et encore moins quand ils le sont avec naturel et, ici, ce cocktail est un pure réussite selon moi. J’ai lu ce roman d’une traite, il y avait longtemps que ça ne m’était pas arrivé, j’ai sursauté quand j’entendais un craquement ou que l’un de mes chats arrivait trop discrètement.
Cela aurait été plus simple s’il n’y avait jamais eu de bons moments. Si papa avait été horrible avec nous tout le temps, cela aurait été plus facile, d’une manière perverse. Plus facile de partir pour de bon, de couper les ponts, de ne plus rien avoir affaire avec lui. J’aurais aimé pouvoir penser qu’il était entièrement malfaisant. J’aurais aimé ne pas me souvenir de la peinture aux doigts, ou du jour où, lors de mon spectacle de fin d’année, il s’était assis devant et avait applaudi avec tout le monde, comme il paraissait fier et pour une fois, n’avait pas crié, ou juré ou frappé quelqu’un.
Si j’avais pu le détester, cela aurait été plus aisé. C’était l’aimer qui rendait tout ça insupportable.
Bon, à ce stade de ma chronique, je crois que vous aurez compris que j’ai passé un excellent moment de lecture et que j’ai vraiment beaucoup aimé ce roman, mais ce n’est pas parce qu’on a adoré qu’il faut oublier de dire ce qui a moins plus.
La fin, c’est mon gros bémol, un peu trop facile en reprenant un schéma vu et revu, trop rapide, trop abrupte, elle ne clôture pas un des personnages les plus importants de l’intrigue, elle néglige d’expliquer des éléments importants (le rire ? Que deviennent les habitants de l’hôtel ? Emma ? le lien Emma/Jem ?)… Elle tranche comme un hachoir l’histoire qu’on a suivi avec une certaine frénésie, j’ai été un peu déçue…
L’autre bémol réside dans le traitement ésotérique du roman, là vous me pardonnerez, je l’espère, je vais chausser deux minutes ma casquette de professionnelle mais, si la partie chasse aux sorcières est bien documentée, il y a un manque flagrant côté ésotérisme moderne, les bâtons d’encens à la myrrhe m’ont bien fait rire par exemple. Vous me direz ça passe crème pour ceux qui ne connaissent pas mais, quand on s’est si bien documenté sur la chasse aux sorcière et le monde maritime, c’est vraiment dommage de tomber dans le folklorisme ésotérique le plus flagrant, et oui, le diable est dans les détails…
En conclusion, nous avons ici un roman terreur de très bonne qualité porté par une écriture maîtrisée très sensorielle. Il a la grande qualité d’aborder des thématiques trop rares en littérature comme le handicape, c’est vraiment très appréciable. Malgré une fin trop rapide et qui cède quelque peu aux facilités, ce roman est une invitation au cauchemar qui ne se refuse pas quand on aime les sorcières et les bateaux fantômes.
Transi dans la brume épaisse et les embruns poisseux, le lecteur frémi à la moindre ombre qui passe, et craint de finir englouti dans les eaux ténébreuses d’une mer ampli de créatures aux dents acérées toutes plus terrifiantes les unes que les autres. Une réussite pour ce terreur qu’il serait dommage de ne réserver qu’aux adolescents… Je ne peux que le recommander vivement !
Ma note finale est donc un 15/20
Pour aller plus loin…
4e de couv. :
Certaines malédictions deviennent de plus en plus puissantes avec le temps…
Suite à un accident, Emma a perdu l’usage de ses jambes. Sept ans plus tard, l’adolescente revient en Cornouailles, sur les lieux du drame : l’auberge familiale du Waterwitch, gérée par sa grand-mère mourante. Ce bâtiment a été construit avec le bois d’une épave, celle d’un navire au passé trouble, maudit raconte la légende.
Parmi les sombres secrets qui hantent l’auberge se cachent des fantômes du passé.
Et l’un d’eux est particulièrement en colère.
Des lectures similaires ? Je vous propose :
Un must read sur les sorcières
=> Rien que des sorcières de Katherine Quenot
Pour de l’Histoire très bien racontée
=> Le juge et la sorcière de Joelle Dusseau
Pour une chasse aux sorcière dans le moyen-âge germanique avec des femmes fortes et insoumises
=> Indulgences de Jean-Pierre Bours
Des nouvelles audio gratuites de quelques minutes sur une bande de sorcières pas comme les autres 😉
=> Hocus Pocus… Calamitas ! de Hilda Alonso
Je suis contente que tu aies bien aimé malgré un petit bémol où deux 😉 c’est un chouette retour !
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J’en déduis que tu l’as lu, je me rappelle pas avoir lu ton retour sur ton blog, je vais retourner voir :-p
Oui j’ai vraiment beaucoup aimé, le bémol ésotérique c’est vraiment pour faire ma chieuse, y a vraiment que la fin que j’ai trouvé trop pas fini ^^
Mais c’est vraiment un bon roman de terreur !
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Oui je l’ai lu à sa sortie donc ça remonte un peu :p c’est probablement pour ça que ça ne te dit rien !
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effectivement 2019, je n’étais pas aussi assidue dans mes mises à jour de lectures de chroniques :-p
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bonjour, comment vas tu? il me tente bien celui là. passe un bon week end et à bientôt!
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j’espère qu’il te plaira 😉
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