Retour de lecture pour : Loin de lui le soleil de Vincent Tassy

Certains de mes retours de lecture peuvent présenter des éléments d’intrigues.


Retour de lecture : 

Ce court roman est le préquel de Apostasie, découvrant Vincent Tassy sur le tard, ce roman est donc le premier que je lis de cet auteur.

Le moins que l’on puisse dire c’est que la plume de l’auteur tient largement de la poésie en prose. Chaotique et onirique, comme l’histoire d’amour qu’il nous raconte, on ne sait jamais bien quand on navigue dans les eaux du rêve, dans les remous du fantasme d’Alvare ou dans la réalité. C’est un roman qui demande un minimum de subtilité intellectuelle, sans laquelle on risque de passer à côté et quel dommage ce serait…

Mon corps pleure, aucune larme, je voudrais que mon amour Alphée soit celé dans un diamant et que mon amour en ce diamant soit une histoire qui se raconte à la tombée de la nuit, mais mon corps pleure, brûlé à n’en plus avoir de larmes, je n’entends rien et il n’y a rien ici qui se donne à voir que la pierre noire du château.

L’univers est tout à la fois cru, cruel, sans concession et pourtant on se laisse envoûter par ce monde gothico-romantique où la pire violence sait être paradoxalement délicate et raffinée.

Les personnages, tout en subtilité, sont montrés dans leur mutation quasiment jour après jour comme un journal où l’on suivrait les mémoires d’Alvare et d’Alphée, deux âmes errantes en prise à des évènements et des créatures qu’ils ne comprennent pas mais qu’ils acceptent cependant avec fatalité tant qu’ils peuvent être réunis.

Ce roman, c’est un labyrinthe de sentiments et un chaos de mémoires déformées et déformantes comme une salle aux miroirs où chaque reflet peut être trompeur.

Un bien joli conte vampirique à la prose unique et très travaillée. Une petite pépite qui ne se révélera qu’à ceux qui savent apprécier les beaux atours d’un univers poétique mais ô combien cruel et dont il faudra pouvoir supporter les conséquences de tortures physiques.

Alphée est encore tout là-haut et on dirait qu’il me regarde mais il est trop loin pour que je sache. Il est immobile et je l’invente rassemblant ses cheveux entre les doigts, les lançant par la fenêtre pour que je remonte auprès de lui. Il me dirait alors que c’est l’histoire de sa vie d’être là malgré lui, de laisser les choses le blesser à mort sans rien faire, voir le temps s’écouler sur lui, ne rien faire pour atteindre la lumière que le cœur désire, il dirait qu’il a passé une éternité à oublier ce que c’était la joie, que ce n’était rien pour lui, qu’autre chose l’attendait mais quoi ? Peut-être ce château où dans le noir il chante l’inexistence de sa douleur ; il dirait que le bonheur est une fumée, une illusion qu’il refuse, il parlerait de sa stase, d’endroits en marbre, déserts, c’est tout ce qu’il me dirait quand je serais auprès de lui dans la plus haute tour. Mais non. J’étais là au pied du château et il ne me voyait pas.

En conclusion, nous avons ici un roman de vampire gothico-romantique. La plume poétique de l’auteur n’est pas pour tout le monde mais ceux qui aiment ce genre, dont je fais partie, apprécieront la maîtrise de son écriture tout autant que la beauté froide et cruelle de son univers. L’histoire d’amour est belle, c’est une danse entre la vie et la mort. Il ne manquera que les Funérailles de Liszt ou la Toccata et Fugue en D Mineur en bruit de fond pour passer un moment de lecture juste parfait.

Ma note finale est donc un 14/20

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Pour aller plus loin…

4e de couv. : « J’ai aimé Alphée dès le premier instant. Comme si je l’avais attendu toute ma vie. Comme si je l’attendais déjà avant même de vivre. Mais de ce premier instant à celui, des années plus tard, où Alphée est devenu Aphelion, qu’y a-t-il eu ? Je ne sais presque rien.
Je voudrais parler de lui malgré tout. Parler de lui, voilà. De sa pâleur, de ses cheveux noirs. De sa voix qu’on entend si peu. De la nuit qui règne sur lui.
Dire son histoire comme je la connais, sans qu’elle ait jamais été dite ou confirmée par lui.
Que chaque mot soit comme prêt à disparaître. Comme une apparition vaine et fragile du désir.
Je ne pourrai pas faire le livre. Seulement l’idée passagère que je me fais du livre. »

Préquelle indépendante d’Apostasie, ce roman prenant et onirique explore le passé d’Alvaron et Aphelion et plonge son lecteur dans d’immenses et fascinantes ténèbres.


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