Retour de lecture pour : La Meute Hurlante Tome 1, Serge Brussolo

Certains de mes retours de lecture peuvent présenter des éléments d’intrigues.


Retour de lecture : 

Cinquième livre dans le cadre du PIF 2020.

[Pour la petite histoire, j’ai mis un temps certain à réussir à regrouper les deux tomes dans ma quête personnelle de compléter certaines anciennes collections poches, je suis donc ravie de pouvoir enfin avoir l’intégralité de l’histoire…]

Il fallait avoir l’idée de mélanger un Japon moderne post-catastrophe, des ninjas, un virus et des loups-garous et d’autres choses que je ne vous spoile pas… et bien Brussolo l’a fait… On a donc ici un concept de virus lycanthropique qui terrorise tout le Japon…  Les loups-garous sont invincibles sous leur forme de loup, des unités spéciales de ninjas les traquent donc sous leur forme humaine et notre protagoniste principal, Ito Fuji est l’un de ces chasseurs. Un personnage taciturne, un peu sauvage et pas très sûr de faire ce qu’il faut mais pourtant très doué et donc jalousé ou du moins regardé avec un oeil différent…

L’animal était magnifique. Une machine de guerre indestructible, un monstre de légende. On pouvait l’attaquer au lance-flammes, lui jeter des grenades, le mitrailler à bout portant, il s’en moquait… Son corps subissait les agressions sans jamais en pâtir. C’était une armure vivante, une armure à quatre pattes conçue pour la guerre à outrance, et, en dépit des recherches menées en laboratoire, on n’avait pas encore découvert le moyen de lui porter préjudice. »

L’écriture est sympathique, dynamique, Brussolo sait posé son ambiance et nous fait évoluer dans un univers qui se peint sous nos yeux… On sent qu’il veut rendre hommage au Japon tout autant qu’il partage un peu de sa richesse au passage, sauf que là , selon moi, ce n’est pas bien dosé pour ce qui est des 114 premières pages au moins.

Avoir des termes japonais paraît totalement logique dans cet univers mais quand il y en a trop dans des moments peu opportuns cela devient des bruits parasites pour le lecteur, le processus d’écriture apparaît et ruine l’effet souhaité… Ce défaut culmine page 114 où on a carrément une explication grossière dans texte « Le sol en avait été ratissé à la mode zen, c’est-à-dire en traçant sur le sable des dessins harmonieux et obscurs […] ce « c’est-à-dire » m’a sorti du texte à peine lu et j’ai bien râlé parce qu’il y a avait à ce moment un suspense qui est retombé comme un soufflé…

Je le dis souvent le plus beau des procédés d’écriture est celui qui est quasi-invisible au yeux du lecteur et si je comprends qu’il y a 15 ans on ne connaissait pas forcément autant le Japon comme on le connait aujourd’hui, je trouve tout ça bien maladroit…

La temporalité, quant à elle, est bien gérée, au début on oscille entre actions et temps de pause confinés à l’ennui mais tout sert le récit, l’action s’emballe dans la deuxième partie du roman quand Ito est contaminé et emmené dans l’ancien onsen, il n’y a plus de temps morts et on sent comme un étau inexorable se resserrer…

Le garçon songea à la phrase d’un sage chinois : « Les Dieux ont créé le chat pour donner aux hommes l’occasion de caresser le tigre ». Pourquoi les dieux avaient-ils créé le loup-garou ? Pour donner aux humains un avant-goût de la bête de l’Apocalypse ? »

Le génie de ce livre se trouve dans le mélange des genres, est-on dans le fantastique ? Dans l’horrifique ? Dans la science-fiction ? Dans un thriller ? Dans un roman psychologique ? La réponse est oui à tout… C’est diablement bien joué, j’adhère totalement !

Brussolo est un conceptuel à n’en pas douter, il a cette faculté à mélanger des éléments que l’on a pas l’habitude de trouver ensemble et ça marche ! Le concept de virus lycanthropique est original, la représentation des loups-garous sort des sentiers battus et rebattus tout autant que le processus de transformation et les particularités physiques qui ont été pensées de bout en bout. Le concept même de ce roman et l’originalité de son traitement sont les énormes atouts de ce roman. 

Un autre point fort de ce livre réside dans le traitement psychologique des personnages tout autant au début avec la psyché de Ito Fuji que dans la deuxième partie avec la mise en scène du huis clos dans le onsen qui offre une étude psychologique des pensionnaires et le panel de ce que l’on peut y trouver : la loi du plus fort, la fuite de la réalité, l’incapacité à gérer les émotions et l’anticipation de la souffrance… etc. Ces analyses psycho-émotionnelles donnent du volume à la narration et met en valeur les scènes d’actions quand elles arrivent.
Et d’ailleurs ces dernières sont extrêmement bien gérées également, elles sont dynamiques, maintiennent une forme de suspense et d’attente. En tant que lecteur on tourne les pages, on retient son souffle, tout ça reste très efficace de bout en bout et la fin de ce premier tome laisse planer un mystère bien prenant qui donne envie de connaître la suite. C’est donc une mission réussie pour ce premier volume (et c’est là que je me félicite d’avoir acquis les deux volumes avant de débuter ma lecture ^^).

N’oublie jamais le précepte qui gouverne notre métier : Il est beaucoup plus difficile de prouver l’innocence de quelqu’un que sa culpabilité,[…] »

Au final, je déplore les quelques maladresses que l’on trouve ici et là parce qu’il y avait réellement de quoi avoir un niveau bien plus élevé et laisser ce roman avoir un impact plus important… Je trouve que ça laisse un sentiment d’inabouti regrettable… Je ne connais pas très bien Brussolo, ce n’est que le deuxième roman que je lis de cet auteur donc je ne peux pas me faire une idée générale sur son style mais c’est dommage, ça l’est d’autant plus que mon édition est celle de 2005 « revue et corrigée par l’auteur »…

En conclusion et pour résumer, malgré mes bémols, j’ai passé un super moment, le mélange des genres et l’originalité des concepts sont les plus gros atouts de ce roman, le traitement psychologique et émotionnel est un autre point fort. Voilà un premier tome qui me donne très envie non seulement de lire le deuxième tome mais aussi d’en lire plus de Brussolo. Je recommande pour ceux qui aime le fantastique et l’action.

Ma note finale est donc un 14/20

Retours de lecture pour le tome 2

Disponible ici

Pour aller plus loin…

4e de couv. : Une épidémie de lycanthropie s’est abattue sur le monde. Les loups-garous sont invincibles, indestructibles. Ils sautent du haut des immeubles et arrachent les portières des voitures avec les dents. L’unique moyen de les supprimer? Les tuer quand ils ont repris forme humaine. Ito Fuji est un ninja, un exécuteur chargé de tuer préventivement tous ceux qu’on soupçonne d’appartenir à la horde. Mais les choses se compliquent lorsqu’il contracte à son tour l’affreuse maladie et devient ce qu’en langage codé on surnomme : un NightHowler…


L’ auteur : Né à Paris en 1951, Serge Brussolo écrit depuis son plus jeune âge. Ses premières tentatives de publication ont lieu dès sa douzième année… A sa sortie de faculté, après des études de lettres et de psychologie, il se lance dans la bataille de l’écriture, vivant dans des conditions précaires pour avoir le temps d’écrire ses premiers textes. Commence alors pour lui une formation à la manière des auteurs américains : métiers incongrus, hétéroclites, qui lui fourniront matière à l’études des milieux les plus disparates. Il lui faudra attendre 1978 pour que sa première nouvelle paraisse, qui sera aussitôt saluée par la critique (notamment par Bernard Pivot alors animateur de l’émission Apostrophe). Funnyway (Editions Denoël) sera en effet couronnée par le Grand Prix de la science-fiction française devenu aujourd’hui le Grand Prix de l’imaginaire.

D’autres prix littéraires ( onze ou douze à ce jour !) récompenseront ses nombreux romans fantastiques publiés dans les célèbres collections Présence du Futur et Anticipation, et qui conduiront la critique à voir en lui  » le Stephen King français « . Qualificatif réducteur, car, pour Brussolo, le fantastique ou la science-fiction ne sont que des prétextes, des clefs permettant d’accéder à un univers psychanalytique où règnent le trouble, l’obscur, l’inavoué. Il se souciera d’ailleurs peu d’observer les règles du genre et s’appliquera plutôt à les pervertir systématiquement au grand scandale des puristes.

Il donnera à Présence du Futur (Denoël) ses plus grands textes hallucinés, littérature visionnaire bourgeonnant au carrefour du baroque et du surréalisme. Ne s’interdisant rien, osant tout, Brussolo deviendra l’auteur qui fait scandale dans un milieu où robots et soucoupes volantes tiennent lieu de pantoufles. Pendant dix ans, il allumera les controverses, la haine et l’adulation la plus absolue. Tantôt voué au bûcher, tantôt hissé sur un piédestal.

A la fin des années 80 il se détourne momentanément du genre pour s’attaquer à la littérature générale et au roman historique. Quoi qu’il soit difficile d’appliquer des étiquettes à ses romans, chacune de ses oeuvres se déplaçant sur plusieurs genres à la fois. Auteur polyphonique, Brussolo est un mutant réconciliant les extrêmes, un maître expert en mélanges, à la manière des auteurs sud-américains toujours attentifs aux arrière-plans du réel, aux mythologies et au fantastique quotidien. Il est important de rappeler que par ses origines il est en partie Brésilien, et qu’il a baigné dans un univers folklorique issu de la selva.

Le prix RTL-LIRE lui est décerné en 1995 pour La Moisson d’hiver. Son entrée dans la collection FOLIO prouve qu’il est tout à fait à l’aise dans l’analyse psychologique et le roman d’atmosphère. Pour certains critiques, Brussolo se situe dans la grande tradition des auteurs populaires comme Simenon ou Frédéric Dard.
Conteur doué d’une imagination surprenante et d’un époustouflant sens de l’intrigue, il s’épanouit dans la littérature criminelle et trouve son inspiration dans les aberrations sociologiques de nos sociétés. Il a reçu le Prix du Roman d’Aventures en 1994 pour Le Chien de minuit paru au Masque et son roman Conan Lord, carnets secrets d’un cambrioleur a été élu Masque de l’année 1995. Ses thrillers explorent le suspense sous toutes ses formes, conciliant roman noir et énigme classique, thriller international et machinations savantes.

Aujourd’hui, de retour dans la collection FOLIO-SF pour laquelle il écrit désormais des textes inédits, il est revenu à ses premières amours.
La Société des Gens de Lettres lui a décerné le prix Paul Féval pour l’ensemble de son œuvre.


D’autres lecture ? Je vous propose :

Le Sang d’immortalité de Barbara Hambly

Scorpi Tome 1 de Roxane Dambre

Le château des Poisons de Serge brussolo